Les collections
Les collections présentées dans cette exposition sont des séries d’images issues de l’inventaire et assemblées à nouveau par des personnalités invitées. Ces « collectionneurs » nous offrent ainsi leur point de vue singulier sur ces territoires. Ils deviennent pour un temps les commissaires d’une vaste exposition photographique qui rassemble ces terrains d’enquête en nous proposant de les parcourir avec eux.
Bertrand Folléa
Paysages de lisière
À propos de la collection
En écologie, la lisière au plein sens du terme constitue un véritable espace d’interface, qui garantit la transition douce entre deux milieux. C’est un écotone : espace de transition écologique entre deux écosystèmes, avec ses conditions de milieu propres, avec des espèces végétales et animales également propres.
En urbanisme, la lisière urbaine est l’espace d’interface entre « ville » et « nature économique », en charge de gérer la relation et les échanges entre les deux, relation fondatrice de paysage. Elle constitue la transition entre l’espace urbanisé ou à urbaniser et l’espace agricole, forestier ou « naturel ». La lisière urbaine peut se matérialiser de multiples façons et à toutes les échelles, depuis la vision métropolitaine d’une agglomération inscrite dans un espaces naturel, jusqu’à la clôture du jardin s’ouvrant sur un espace agricole.
Elle peut se constituer progressivement en étant programmée dans les opérations d’urbanisme, concrétisant la limite d’urbanisation par son épaisseur. Elle peut être spécifiquement aménagée pour cela, participant ainsi de l’organisation du territoire. La lisière prend alors le plus souvent la forme d’un espace planté, accessible et appropriable pour les habitants : manière pour la ville ou le quartier de se tourner vers l’espace agricole ou de nature, de reconnaître tout simplement son existence et sa valeur.
Or, souvent, les espaces de relation entre les zonages de l’urbanisme et de l’aménagement (zone urbaine, zone agricole, zone naturelle) forment les angles morts des politiques publiques, révélateurs de leur sectorisation : entre grands ensembles et massifs ; lotissements et espaces agricoles, naturels ou forestiers ; zones d’activités et campagne agricole ; villes ou villages et littoral, cours d’eau ou zones humides ; espaces de loisirs et nature ; etc. La lisière, non reconnue en tant que telle, s’amenuise, donnant lieu à des situations problématiques pour les usagers des limites urbaines : oubli des connexions vers les espaces de nature environnants dans les nouveaux quartiers, disparition des terres agricoles au profit d’une urbanisation mal contrôlée, accroissement des risques liés aux incendies par la confrontation directe entre habitat et forêt, etc.
Le Projet de Paysage métropolitain a identifié dans de nombreuses démarches en cours ces secteurs d’interfaces comme une thématique récurrente et polymorphe devant être mise au service des objectifs de (re)qualification, restauration, préservation et valorisation du territoire. La Métropole Aix-Marseille Provence a missionné dans ce sens l’Agence Folléa-Gautier pour réaliser un Plan de paysage visant à réinterpréter ces espaces de lisières, comme une véritable interface d’échanges et de diversités.
Bertrand Folléa
Bertrand Folléa est, avec Claire Gautier, cofondateur et cogérant de l’agence Folléa-Gautier paysagistes urbanistes, Grand Prix National du Paysage en 2016.
Depuis 1991, l’agence Folléa-Gautier conçoit et met en oeuvre des projets d’aménagement en France métropolitaine, en outremer et à l’international : jardins, espaces publics, écoquartiers, renouvellement urbain, infrastructures, sites culturels et touristiques, espaces naturels, … Elle réalise également des études et projets d’urbanisme, de paysage et d’aménagement du territoire aux échelles régionales, départementales, intercommunales et communales : plans d’urbanisme et de paysage, documents d’urbanisme, atlas de paysage, … L’agence Folléa-Gautier considère le paysage comme la spécialité de la non spécialité : tel que perçu et vécu par les populations, il concerne en effet l’ensemble des champs sectoriels de l’aménagement. L’approche sensible, qui met l’humain au centre, est toujours privilégiée par l’agence dans ses processus d’étude, de conception et de mise en oeuvre.
Bertrand Folléa partage son temps entre les projets de l’agence Folléa-Gautier et l’enseignement (Ecole nationale supérieure de la nature et du paysage de Blois/INSA CVL, Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles – Marseille). Il est également directeur de la chaire d’entreprise ‘Paysage et énergie’ à l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles – Marseille depuis 2015.
Véronique Mure
Habiter à plusieurs peuples sur le même sol
À propos de la collection
Je fais impudemment mien ce titre d’un article du sociologue Antoine Hennion1 posant une question : Comment co-habiter, égaux et différents ?
C’est cette question que je voudrais prolonger ici. Comment habiter en arbre dans le monde des hommes ?
Les données scientifiques ne manquent pas. Nous le savons, les arbres ne vivent jamais seuls, ils ont besoin de faire société. Nous savons aussi, au moins inconsciemment, que nous sommes intimement liés aux arbres, et plus généralement au règne végétal. Nous, genre humain, ne poursuivrons pas le voyage sans eux, sans leur présence bienveillante et salvatrice. Dans l’antiquité déjà, le platane d’Orient (Platanus orientalis), père de notre platane hybride, était planté dans l’espace public. Pline l’ancien, au 1er siècle, en témoigne.
Mais qui ne s’étonnera à juste titre qu’on fasse venir d’un monde étranger un arbre, uniquement pour son ombrage ? (…) Cela se passait vers l’époque de la prise de Rome (an de Rome 364 – IVe siècle avant notre ère). Depuis, cet arbre est devenu dans une telle estime, qu’on le nourrit en l’arrosant de vin pur.2
Nous devons cependant prendre acte de la façon dont nous accueillons aujourd’hui le règne végétal dans la ville, et plus précisément dans les aménagements produits par nos sociétés carbonées, noyées dans le bitume. Nous avons perdu le lien, l’estime. Pour reprendre les mots de Baptiste Morizot, nous devons prendre acte de l’appauvrissement de la relation que nous tissons avec le monde vivant. (…) on « n’y voit rien », on n’y comprend pas grand-chose, et surtout, ça ne nous intéresse pas vraiment (…) ça n’a pas de place légitime dans le champ de l’attention collective, dans la fabrique du monde commun.3
- Hennion, A., Habiter à plusieurs peuples sur le même sol, Actes du colloque « Brassages planétaires, jardiner le monde avec Gilles Clément » Ed. Hermann, 2020.
- Pline l’ancien, Naturalis historia, 1er siècle.
- Morizot, B., Il faut politiser l’émerveillement. Itw par Nicolas Truong, Le Monde – 04 août 2020
Véronique Mure
Botaniste et ingénieur en agronomie tropicale, Véronique Mure défend depuis 30 ans la place des arbres dans les villes, les jardins et les paysages méditerranéens.
Une grande partie de son parcours professionnel s’est fait dans le domaine public où elle s’est attachée, entre autre, à préserver et valoriser les paysages qui font l’identité de ces territoires.
Elle exerce aujourd’hui une activité indépendante d’expertise et conseil en botanique. Crée en 2010, Botanique-Jardins-Paysage, basé à Nîmes, est spécialisé dans l’étude de la flore, en particulier méditerranéenne, et de ses liens avec les paysages d’un point de vue naturaliste, historique ou prospectif. Que ce soit dans ses missions d’analyse, de conseils ou d’interprétation Véronique Mure œuvre pour donner toute sa place au vivant dans les projets. C’est une conviction qu’elle aime partager et transmettre, qui l’a amené à publier plusieurs ouvrages et à enseigner la botanique à l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles site de Marseille, ainsi qu’à l’université du temps libre de Nîmes.
Jean-Noël Consales
Agraire
À propos de la collection
Tous les manuels de géographie rurale l’affirment : les paysages agricoles méditerranéens ne peuvent s’envisager qu’au pluriel, au regard de leur grande diversité. En effet, en fonction des variations des caractéristiques physiques locales, mais aussi des différences d’interprétations que font les sociétés méditerranéennes de ces spécificités à travers le temps, les configurations spatiales liées à l’agriculture et à l’élevage changent fortement d’un territoire à l’autre, d’un finage à l’autre.
Quelle diversité agricole traduisent les paysages provençaux, bucco-rhodaniens ou métropolitains ? Par-delà les seuls héritages de la trilogie méditerranéenne (blé, vigne, olivier), se révèle toute la richesse de faciès cultivés qui se déclinent non seulement en raison de facteurs naturels (pente, sols, microclimats, etc.), mais encore en raison de facteurs humains (irrigation, savoir-faire, organisations sociales, techniques, etc.). Les terroirs, qui résultent de la lecture plus ou moins séculaire que font les hommes et les femmes de la petite portion de croûte terrestre qu’ils habitent, donnent ainsi à voir des organisations spatiales subtiles entre l’ager (l’espace cultivé), le saltus (l’espace non-cultivé dédié à l’élevage) et la silva (l’espace des bois et des forêts).
Ces paysages traduisent également quelques invariants agricoles typiquement méditerranéens, parmi lesquels figurent notamment l’irrigation qui répond à la sécheresse du climat, ou les liens étroits qu’entretiennent les économies agraires avec les villes.
Il ne s’agit pas, toutefois, de considérer ces paysages agricoles de manière figée, au seul prisme de leur épaisseur historique. Il faut, au contraire, les apprécier de façon dynamique, c’est-à-dire les envisager comme des structures spatiales en perpétuelle évolution. A cet égard, il convient de mettre en évidence les grandes causes de mutations paysagères, au premier rang desquelles se présente l’urbanisation massive que subissent les territoires méditerranéens. Se posent alors la question de l’avenir de leurs agricultures, dans un contexte d’urgence environnementale et écologique. Sans doute que les multiples appropriations citoyennes de l’agriculture qui s’inventent jusqu’au cœur des villes (agricultures urbaines) dessinent des pistes de réponses possibles, éminemment porteuses d’espoir.
Jean-Noël Consales
Jean Noël Consalès est docteur en géographie et aménagement du territoire depuis 2004. Il est l’auteur d’une thèse intitulée « les jardins familiaux dans l’arc méditerranéen : laboratoires territoriaux de l’agriculture urbaine ». Depuis 2005, il est maître de conférences en géographie, aménagement du territoire et urbanisme (Aix-Marseille Université/UMR TELEMMe). Ses travaux de recherches portent sur les relations ville/nature et sur la mobilisation de la nature dans les projets d’aménagement du territoire, d’urbanisme et de paysage, à différentes échelles territoriales. Ils se fondent sur quatre champs : les sciences du paysage, la planification et l’urbanisme paysagers, l’agriculture urbaine et le jardinisme.
Jean Noël Consalès est l’auteur d’une cinquantaine de publications sur ces sujets. Il a participé à de nombreux programmes de recherches sur la nature en ville (trame verte et bleue ; agriculture urbaine ; sols urbains). Il co-dirige le parcours de Master « Projet de Paysage, Aménagement et Urbanisme » de l’IUAR (AMU).
Zoé Hagel
Raconter d’autres histoires
À propos de la collection
La possibilité d’un monde commun exige de nous éloigner de ce que l’on considère comme évident et qui nous exonère trop facilement de nous interroger sur ce, celles et ceux qui se trouvent exclus par ces apparences d’incontestabilité et d’inéluctabilité. Les injustices embarquées écrasent en effet la pluralité de ce qui nous constitue en tant que vivants, de même qu’elles occultent la diversité de nos appartenances et interdépendances, réduisant ce faisant la diversité de nos possibles devenirs.
Il s’agit en ce sens de réapprendre à être sensible au fait qu’habiter « c’est toujours cohabiter » (Morizot) et de cesser par là-même de refuser aux « autres que soi », humains comme « non-humains », le statut d’habitant (Ferdinand, Morizot). Faire face à la mise en danger continuelle du vivant suppose donc de transformer le champ de nos attentions et nos manières de faire importer. Cela nécessite d’apprendre à déhiérarchiser pour laisser émerger de nouvelles questions et parvenir à ne plus séparer mais au contraire penser et rencontrer « des êtres toujours-déjà mélangés, attachés » (Hache 2011).
Nous avons dès lors besoin d’élargir nos facultés à écouter, regarder, mais aussi nous laisser toucher par nos milieux et les raconter. Les photographies exposées s’offrent ici comme des prises concrètes, véritables voies ouvertes sur des possibilités de lire autrement les présences qui à la fois nous accompagnent et nous constituent. Expériences sensibles de nos milieux, elles nous mettent en capacité d’autres récits, où l’autre n’est pas forcément celui ou celle voire même ce que l’on croit. Réinterrogeant nos modes d’habiter par ce qu’ils nous font concrètement, à travers ce qu’ils engendrent, mettent en relations et génèrent, ces œuvres redonnent de l’épaisseur à ce qui nous fait vivre. Dépliant nos communautés, elles organisent la possibilité de futures rencontres.
Ce sont dès lors notre pouvoir d’agir et nos conditions mêmes d’êtres vivants qu’elles intensifient.
Zoé Hagel
Zoé Hagel est Maître de Conférence à l’université d’Aix-Marseille. Son cheminement de l’écologie scientifique à l’urbanisme s’ancre dans la nécessité de déhiérarchiser nos regards sur l’existant et le désir de déplier nos manières de vivre et d’habiter. Faisant place aux dimensions sensibles et vécues, ses approches interrogent la fabrique urbaine au prisme de ce que les milieux urbains nous font concrètement, à travers ce mais aussi celles et ceux qu’ils mettent en relations.
Sylvain Prudhomme
Romans
À propos de la collection
J’ai voulu rassembler ici des photos qui avaient à mes yeux cette particularité : être à elle seule des romans. Photos-romans, comme il y a des romans-photos, à ceci près que ces images-là n’illustrent rien, ne montrent nulle action en cours, ne renferment nulle anecdote – surtout pas d’anecdote.
Simplement elles attendent. Hospitalières. Ouvertes. Actives.
Images en attente de fiction. Qui sitôt contemplées enclenchent l’imagination, appellent la fable. Ce n’est pas quelque chose qui est déjà là, sous nos yeux, dans le cadre. C’est quelque chose qui va se passer, dans une seconde, dans un instant. Et la photo déjà le sait.
Je pense à ces graines capables de rester des décennies sans germer dans le désert, jusqu’au jour où quelques gouttes de pluie les réveillent. Je pense au nom donné par les botanistes à cette faculté : la dormance. Images douées de dormance. Images-mondes, pleines, grosses de possibles, vibrantes d’événements à venir.
Comme si aux trois dimensions de l’espace s’en ajoutait une autre, sorte de profondeur insituable qui aussitôt m’arrête et m’absorbe : quelque chose d’une réserve, d’un suspens avant le surgissement. Un potentiel de fiction partout affleurant. Roman en puissance, sur le point d’éclore.
Sylvain Prudhomme
Biographie à venir.
Les séries
Les photographies rassemblées par cet inventaire sont issues de travaux d’enquêtes réalisés depuis les années 1980 dans l’aire métropolitaine des Bouches-du-Rhône. Chaque série d’images est présentée par son auteur, renseignée par lui et accompagnée des informations et des documents qui permettent de comprendre la nature de l’enquête et le contexte de la commande. Les séries sont exposées ici les unes en regard des autres et dressent ainsi le portrait complexe et kaléidoscopique d’un territoire métropolitain.
Julien Marchand
From the wasteland
À propos de la série
« Travail personnel, poursuivi sur la même zone pendant plusieurs années. Je me suis intéressé aux marges de la route départementale D3 que j’ai commencé à prendre lorsque mes parents ont déménagé près de Rians. Depuis, à chaque voyage pour les voir, je photographie l’évolution des marges d’un tronçon de route. L’idée est de creuser par l’image une partie de ce paysage laissé à l’abandon. Les ruines côtoient les véhicules abandonnés, il y règne une ambiance d’enquête très particulière que seul Giono a su mettre en avant. C’est un territoire ambigu, sensible et dérangeant de par son immobilité. » Julien Marchand
- Année•s : 2015-2019
- Commune•s : Ginasservis, La Verdière, Rians, Saint-Julien-le-Montagnier, Saint-Paul-lès-Durance, Vinon-sur-Verdon
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Julien Marchand
Julien Marchand
Né en 1980, vit et travaille à Marseille.
Atlas Métropolitain — Durand / Gendre / Llenas / Navarro
Monuments
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 2012
- Commune•s : Aix-en-Provence, Berre-L'Étang, Fos-sur-Mer, Gardanne, Marseille, Martigues
- Commanditaire•s : ENSA-Marseille
- © Durand / Gendre / Llenas / Navarro
Documentation :
Atlas Metropolitain_Annexes_Inventaire (pdf)Atlas Métropolitain
Biographie à venir.
Sylvain Duffard
Observatoire photographique des paysages des Alpilles
À propos de la série
« En 2010, le Parc Naturel Régional des Alpilles me confie la conduite de la mission photographique de l’Observatoire des paysages. Dans ce cadre, mon intention a été de saisir quelque chose de l’histoire des lieux sur lesquels je me suis arrêté tout en m’attachant simultanément aux signes révélant les permanences observables comme les transformations paysagères à l’œuvre. Passer par la production de prises de vue – acte par essence furtif – pour interroger le temps long du paysage, voilà pour ainsi dire résumée l’ambition qui est celle du photographe qui intervient dans le cadre d’un tel Observatoire. Après avoir réalisé la campagne photographique initiale au printemps 2011, j’ai re-photographié une dizaine de points de vue durant l’hiver 2012 avant d’assurer successivement la reconduction photographique complète des cinquante points de vue de l’Observatoire en 2013 puis 2017. » Sylvain Duffard
- Année•s : 2011
- Commune•s : Parc Naturel Régional des Alpilles
- Commanditaire•s : Syndicat Mixte du Parc Naturel Régional des Alpilles
- © Sylvain Duffard / Syndicat Mixte du Parc Naturel Régional des Alpilles
Sylvain Duffard
Né en 1975, Sylvain Duffard est photographe indépendant. Il vit et travaille à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Diplômé de l’Institut de Géographie Alpine (IGA), Université Joseph Fournier de Grenoble en 1999, c’est en autodidacte que Sylvain Duffard développe sa pratique photographique. Se confrontant à la commande dès 2006, il développe un travail portant sur le paysage quotidien, démarche rapidement sous-tendue par l’émergence de questionnements relatifs à ses modes de fabrication. Il fait ensuite l’expérience de la commande publique dans le cadre de missions photographiques consacrées à l’observation du paysage ; commandes inscrites dans le sillage de missions photographiques historiques telle que celle que la DATAR engagea au début des années 1980. Ces expériences constituent pour lui un espace d’apprentissage privilégié et le lieu d’une expérimentation riche et personnelle du paysage. De 2008 à 2010, il répond à une commande de l’Office National des Forêts ; commande qui donnera naissance à sa série « La forêt habitée ». Il réalisera ensuite successivement les séries chronophotographiques de trois Observatoires photographiques des paysages, à l’échelle du Parc Naturel Régional des Alpilles, puis du département de Haute-Savoie et enfin de l’Archipel Guadeloupe. De 2017 à 2018, l’Atelier des Places du Grand Paris lui confie une commande de paysage relative aux sites jouxtant certaines des futures gares du Grand Paris Express.
Bertrand Stofleth
Rhodanie
À propos de la série
Rhodanie est une série photographique de Bertrand Stofleth. Il a suivi le cours du Rhône sur plus de 850 km, depuis sa source, un glacier dans le Valais, jusqu’à ses embouchures en mer Méditerranée. L’artiste travaille sur les paysages et les modes de domestication des espaces naturel, afin d’observer les usages et les différentes formes de résiliences à l’œuvre auprès des habitants et des territoires traversés. Il construit ainsi un dialogue entre le paysage fluvial et l’espace frontière qui le borde, interrogeant ce qui se joue entre le fantasme d’une nature encore sauvage et son caractère profondément domestiqué.
- Année•s : 2007-2015
- Commune•s : Arles, Fos-sur-Mer, Salin-de-Giraud, Tarascon
- Commanditaire•s : État français, Ministère de la Culture et de la Communication, Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Travail personnel
- © Bertrand Stofleth / SAIF
Documentation :
Bertrand Stofleth_Rhodanie_Annexes_Inventaire (pdf)Bertrand Stofleth
Bertrand Stofleth Artiste et photographe né en 1978 de nationalité française. Diplômé de l’École nationale supérieure de photographie d’Arles en 2002. Ses recherches artistiques portent sur les modes d’habitation des territoires et interrogent les paysages dans leurs usages et leurs représentations. Il documente les lieux intermédiaires : rives d’un fleuve (« Rhodanie », éditions Actes Sud et « Paysages déclassés », éditions 205), chemins de randonnée (« Paysages Usagés OPP-GR2013 », commande CNAP-MP2013, éditions Wild Project), ou abords de métropoles (« Transplantations et Déplacements »). Il construit différents projets d’observatoire photographique du paysage avec le photographe Geoffroy Mathieu auprès de Parc Naturel Régionaux (Monts d’Ardèche, Gorges du Verdon, Narbonnaise en Méditerranée). Depuis 2013, en collaboration avec l’artiste Nicolas Giraud il réalise un projet documentaire des paysages issus de la révolution industrielle (« La Vallée », éditions Spector Books, 2021). Il poursuit le projet Aeropolis explorant les relations entre les imaginaires aéroportuaires et leurs connexions aux territoires urbains (Commande publique nationale de photographie CNAP et Atelier Médicis 2017, Résidence Diaphane 2015). Il travaille actuellement sur trois différents projets interrogeant les changements paysagés liés au réchauffement climatique à différentes échelles de territoires et de paysages : « Recoller la montagne » (Résidence de création Archipel Art Contemporain, 2019-20), « Mission Photographique Grand Est » (La Chambre, Le Cri et Région Grand-Est, 2019-2020), « Observatoire métropolitain de l’Anthropocène » (Ecole Urbaine de Lyon 2020-2023). Il enseigne la photographie en écoles d’art et à l’université. Son travail est présent dans différentes collections publiques et privées en France et à l’étranger.
Éric Bourret
Sainte-Victoire, la montagne de cristal
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 2013-2015
- Commune•s : Massif de la Sainte-Baume, Montagne Sainte-Victoire, Parc Naturel Régional des Alpilles
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Éric Bourret
Éric Bourret
Né en 1964 à Paris, Éric Bourret vit et travaille dans le Sud de la France et en Himalaya. Son oeuvre d’« artiste marcheur », s’inscrit dans la lignée des Land Artists anglais et des photographes-arpenteurs de paysages. Depuis le début des années 1990, Il parcourt le monde à pied, traversant tout horizon à toute altitude, effectuant des prises de vues photographiques qu’il nomme « expérience de la marche, expérience du visible ». Dans ces images, Éric Bourret exprime les transformations sensorielles et physiques profondes que provoque la marche. L’expérience du trajet parcouru exacerbe la perception et la réceptivité au paysage. Au cours de ses marches, de quelques jours à plusieurs mois, selon un protocole conceptuel précis qui détermine le nombre et les espacements des prises de vue, l’artiste superpose différentes vues du même paysage sur un seul négatif. Ces séquences intensifient et accélèrent l’imperceptible mouvement des strates géologiques et fige l’éphémère temporalité de l’homme. L’accident, l’imprévu sont assumés dans ce concept de saisies photographiques aléatoires. Elles témoignent d’une expérience subjective, ainsi qu’il le confie lui-même : « Je suis constitué des paysages que je traverse et qui me traversent. Pour moi, l’image photographique est un réceptacle de formes, d’énergie et de sens. » Cet éphéméride photographique désintègre la structure de l’image initiale et crée une autre réalité mouvante, sensible. L’image, née de ce « feuilleté temporel », est vibrante, oscillante, presque animée. Des séries plus factuelles insèrent date, lieu, durée, distance parcourue et transmettent ainsi le rythme et l’espace de ce carnet de marche. Depuis 1990, son travail a fait l’objet de nombreuses expositions et acquisitions dans les musées et Centres d’art, en Europe, aux États-Unis et en Afrique, notamment the Finnish Museum of Photography à Helsinki ; the Museum of Contemporary Art of Tamaulipas au Mexique ; le Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de Nice ; le Musée Picasso à Antibes ; la Maison Européenne de la Photographie de Paris.En 2015-19, il a participé à plusieurs expositions : la 56e Biennale de Venise ; Joburg Contemporary African Art ; AKAA à Paris ; Start à la Saatchi Gallery de Londres ; Shenzhen Art Museum, Chine ; l’Espace de l’Art Concret, Mouans-Sartoux ; Sapar Contemporary, New-York ; Xie Zilong Art Museum, Chine.
Vincent Beaume
Chemins[perdus?]
À propos de la série
Poursuivant une démarche sur la géographie sensible des territoires que je mène depuis plus de dix ans dans la série Chemin[s], j’ai choisi de travailler sur le patrimoine commun, fragile et éphémère.
J’ai porté mon regard sur les chemins qui disparaissent dans la ville et dans les alentours de Saint-Cannat. Mes photographies sont une invitation à reprendre les sentiers ruraux, les pistes pastorales, les chemins de transhumance, les via antiques, romaines ou royales qui traversent notre territoire. Ces chemins, autrefois vivants, tombent aujourd’hui dans l’oubli.
Jonchés par les propriétés privées, barricadés par les rubalises, fils électriques et autres barrières, ces chemins sont souvent méconnus par les promeneurs, habitants et acteurs publics. Transformés en terres agricoles ou confisqués par des particuliers, ces chemins deviennent des terres privées inaccessibles. Cette problématique n’est pas propre à Saint-Cannat et se pose sur l’ensemble du territoire national.
Des chemins qui s’effacent.
Disparaissent dans la broussaille.
Effacent le bruit des pas.
Restera t-il une trace ?
Restera t-il des traits noirs sur les cartes ? Serons-nous capables de les revoir ?
Ces chemins appellent pourtant à une poésie des pas et à la contemplation. Chênes centenaires, bords de rivière, fermes en ruine… Lieux d’une porosité sensible, ils pourraient devenir des territoires d’apprentissage commun sur notre monde.
Voir à nouveau les arbres qu’on ne regarde plus. Les roches qui ne semblent être que de simples cailloux alors qu’elles sont ancrées dans la lente géologie du monde et racontent nos histoires.
Percevoir le paysage de notre quotidien pour en prendre soin et le cultiver.
Voir et regagner ces chemins.
- Année•s : 2020
- Commune•s : Saint-Cannat
- Commanditaire•s : Centre photographique de Marseille, Conseil Général des Bouches-du-Rhône, Patrimoine Commun
- © Vincent Beaume / SAIF
Vincent Beaume
Vincent Beaume, auteur photographe, né en 1980, vit et travaille à Marseille. Formé par Léon Claude Vénézia, son parcours débute au moment du passage de l’argentique au numérique. Alors photographe de presse, la « chasse à l’image » lui renvoie à la morbidité du rapport de notre société à celle-ci. Après la coupure d’une longue marche dont il est coutumier, le retour de Vincent transforme profondément sa relation à la photographie.
Son refus de « la prise de vue » à l’affût, le mène vers l’image-projet, une conception de la relation à l’autre et à un monde sensible partageable.
Ses créations « L’Insomnante », « Chemin[s] », « Le Groupe des 15 » ont été exposées dans de nombreuses scènes nationales (à Gap, Besançon, Marseille, Arras, Foix, Metz…) et des galeries (Zemma, Aux Docks d’Arles, Maison de la Photographie Vivian Maier…). Ces dernières années, il a bénéficié de résidences de création (Institut français du Maroc, Scènes nationales, Résidence territoire (DRAC), Centre Photographique Marseille, etc.) et de commandes institutionnelles (Politique de la Ville, Archives Départementales).
En 2023, il a obtenu la bourse Soutien à la photographie documentaire contemporaine du CNAP pour son projet « Chemin[Le Drac] ».
Son attrait aux mélanges des pratiques et écritures artistiques l’ont amené à collaborer avec plusieurs artistes, (Loïc Guénin, Camille Boitel, Claire Ruffin, Robin Decourcy, …) soucieux des passerelles qui existent entre la photographie et les autres formes sensibles.
Karine Maussière
L’Huveaune et tiers paysages
À propos de la série
« En 2002 je m’installe à St Marcel dans 11eme arrondissement de Marseille, près du fleuve l’Huveaune et découvre ses territoires adjacents, son passé industriel, ses mutations. Terrains de jeu, lignes paysages en devenir, Tiers Paysages ou fragments indécidés, font références aux recherches de Gilles Clément et désignent la somme des espaces où l’homme abandonne l’évolution du paysage à la seule nature. Afin de comprendre et de révéler ce qu’il est, je décide de descendre l’Huveaune jusqu’à la mer et commence à construire un travail personnel sur la transformation du paysage les pieds dans l’eau. D’autres explorations suivront dans la vallée, à différentes époques, avec différentes outils : en 2002 à mon arrivée j’utilise un rolleiflex, en 2005 j’essaie un petit outil un photophone Sony Ericsson, en revenant d’un mon tour du monde en 2008 l’Iphone. Les photographies prises de manière frontale, représentent des paysages en devenir, souillés par l’histoire et les hommes. Elles questionnent les strates de la mémoire, se veulent une lecture du territoire tout à la fois sensible et poétique. En 2010, j’ouvre le champ au public et propose avec la Galerie des Grands Bains Douches ma première balade urbaine « les pieds dans l’eau » : une nouvelle approche artistique à la découverte d’un territoire. D’autres suivront … la L2, le Boulevard Urbain Sud… Territoires marseillais, à la fois domptés et sauvages, souillés et parfois d’une beauté sereine, je nous parle d’un jardin. D’un jardin discontinu, passant par les jardins oubliés, terrains vagues, friches industrielles… inventant de nouveaux tracés pour des petites randonnées urbaines (PRU). » Karine Maussière
- Année•s : 2002-2017
- Commune•s : Vallée de l'Huveaune
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Karine Maussière / SAIF 2020
Karine Maussière
« Je vis sous le soleil, exactement, au milieu d’un jardin, dans le sud de la France. Née en 1971 d’un père passionné de haute montagne, je me familiarise très tôt à la marche. De cette enfance baladée, il me reste des paysages arpentés, écoutés, contemplés, humés, aimés. Traces durables qui me font aujourd’hui encore m’émerveiller face à la beauté du monde. C’est dans cet élan que je positionne mon esprit dans un mouvement d’ouverture. Les paysages me procurent un sentiment d’être au monde en favorisant une appartenance commune à la terre. Diplômée des Beaux Arts, j’utilise la photographie dans ma relation au monde tout en interrogeant ma place dans la pensée écologique à l’ère de l’anthropocène. « Ensemble, nous décidons que la Terre est un seul et petit jardin. » Cette proposition de Gilles Clément, initiateur du jardin planétaire, bouleverse la réflexion sur l’homme et son environnement. La Terre est, comme le jardin, un espace clos, fini et arpentable que l’Homme doit ménager. A partir de ces idées, je choisis de mettre le paysage au coeur de mes préoccupations et décide de développer des axes de recherches sur les paysages. Paysages à la nature changeante mais aux qualités esthétiques indéniables, le paysage devient sujet d’étude et de représentation. La quête de son appropriation habite ma recherche artistique. Cette appropriation se fait par l’image et par le mouvement du corps. Depuis, la notion du mouvement est comme un leitmotiv. » Karine Maussière
Atlas Métropolitain — Castres / Daher / Mallet
Sports et loisirs
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 2012
- Commune•s : Châteauneuf-les-Martigues, Marseille, Martigues, Montagne Sainte-Victoire, Parc Naturel Régional des Alpilles
- Commanditaire•s : ENSA-Marseille
- © Castres / Daher / Mallet
Documentation :
Atlas Metropolitain_Annexes_Inventaire (pdf)Atlas Métropolitain
Biographie à venir.
Atlas Métropolitain — Aulagner / Jaumot
Les nouveaux territoires de l’habiter
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 2015
- Commune•s : Aix-en-Provence, Aubagne, Gignac-la-Nerthe, Gréasque, Martigues, Pennes-Mirabeau, Plan-de-Campagne, Saint-Mitre-les-Remparts, Vitrolles
- Commanditaire•s : ENSA-Marseille
- © Aulagner / Jaumot
Documentation :
Atlas Metropolitain_Annexes_Inventaire (pdf)Atlas Métropolitain
Biographie à venir.
Atlas Métropolitain — Freychet / Martin
Patrimoine touristique
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 2013
- Commune•s : [Non renseigné]
- Commanditaire•s : ENSA-Marseille
- © Freychet / Martin A
Documentation :
Atlas Metropolitain_Annexes_Inventaire (pdf)Atlas Métropolitain
Biographie à venir.
Sébastien Arrighi
Wasteland
À propos de la série
« Le projet Wasteland est une exploration du bassin de rétention du barrage de Bimont, près d’Aix-en-Provence, durant sa phase de restauration en 2018. Privé de sa principale source d’alimentation, la galerie artificielle de la Campane, le bassin s’est retrouvé asséché, laissant apparaître un désert fragile et isolé, curieusement semblable à d’autres espaces, à d’autres contrées. Cependant le retrait de ces eaux, nous révèle la Cause (rivière naturelle du site). Elle ruissèle depuis la face nord de la Sainte-Victoire et semble reprendre ses droits, en parcourant à nouveau ce paysage découvert et les restes qui le compose. Débris et autres reliques d’ordinaire invisibles, tels les témoins d’un autre temps. Que les eaux acheminées depuis les Gorges du Verdon, allaient sous peu dissimuler et recouvrir d’une resplendissante étendue turquoise.
Spectateur privilégié de ces différentes scènes, la proximité de mon lieu de résidence avec le site, ainsi que le soutien de la DRAC PACA m’ont permis d’entreprendre ces nombreuses reconnaissances, promenades et découvertes. À l’aide de ma chambre photographique de grand format. Matériel lourd m’obligeant à limiter mes déplacements au profit de vastes expectatives, révélatrices d’apparences inespérées. »
Sébastien Arrighi
- Année•s : 2017-2019
- Commune•s : Saint-Marc-Jaumegarde
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Sébastien Arrighi
Documentation :
Annexes_Sebastien Arrighi_Inventaire (pdf)Sébastien Arrighi
Sébastien Arrighi (né en 1992 à Ajaccio, Corse-du-Sud), est un artiste diplômé avec les félicitations du jury de l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence. Ses travaux photographiques et vidéo sont régulièrement exposés et saluées par des prix français et internationaux. La Collectivité de Corse, la DRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur ainsi que le CNAP apportent leur soutien à ses nombreuses recherches par le biais d’aides à la création, à la publication et à l’exposition. Il est également représenté par la galerie Sintitulo à Mougins depuis 2018.
Qu’il s’agisse de paysages du quotidien ou d’énigmatiques scènes, les images de Sébastien Arrighi appréhendent le réel différemment. Ainsi, la corporalité étrange qui est propre à la brume ou aux stries du dehors, fait la teneur profonde et intime de ses images. D’une tension et d’un désir en résulte des objets, des morceaux de paysages, que la pensée puisse exprimer. Ce sont des relations anonymes et opaques qui arrivent sans mot, sans nom, des relations recouvertes et masquées. Tel des univers parallèles qui communiquent et finissent par s’entrecroiser, suite à des glissements géologiques qui auraient finalement bouleversé l’ordre ou la mémoire des temps.
Fabrice Ney
Soude
À propos de la série
« Soude est un travail à l’origine proposé par l’auteur à l’EPAREB à la suite d’un rendez-vous avec Messieurs Ecochard et Demouchy, intéressés une sensibilisation des habitants à l’histoire industrielle du territoire. Il a été financé par l’EPAREB, La ville de Fos-sur-Mer et la ville de Marseille. Ce travail, réalisée entre 1988 et 1993, est associée à la création de l’association SITe (Sud, Image, Territoire), dont l’objet associait la recherche et la création sur l’image des lieux et du territoire à la sensibilisation sur les enjeux de leur représentation. Les marges en déprise industrielle du territoire sont abordées à travers la question du paysage en photographie et de l’exploration de ses déclinaisons possibles. « Soude » propose la lecture photographique d’une strate historique commune aux paysages d’un territoire donné. Ce projet, réalisé entre 1988 et 1993, est l’étude photographique des vestiges, datant du XIXème siècle, des débuts de l’industrie chimique lourde dans les Bouches-du-Rhône. Sa réalisation a demandé une connaissance approfondie de cette histoire par la lecture des ouvrages alors disponibles sur le sujet, mais surtout par une consultation des archives municipales, départementales et nationales ainsi que des fonds spéciaux de la bibliothèque municipale de Marseille et de la CCIM. En effet, mon projet n’était pas de photographier quelques ruines pittoresques, ou illustratives de cette histoire. Je devais acquérir la capacité de comprendre ce que je photographiais. Je ne documentais pas cette histoire, j’actualisais ses traces en en livrant des interprétations photographiques. Au-delà de son aspect documentaire indéniable, cet ensemble d’images questionne à travers la visibilité de ses vestiges, l’histoire industrielle du territoire. Ce questionnement s’effectue sous des angles croisés, en déclinant différentes approches du paysage. Les prises de vue explorent les distances possibles aux motifs. Elles interprètent, d’abord, en plan large, l’organisation de l’espace, les configurations possibles de mises en valeur des rapports entre ses éléments constitutifs. Puis se rapprochant à mi-distance, elles affinent la vision par le choix d’objets dominants rythmant graphiquement des séries. Enfin, le regard devient insistant sur les textures et leurs occurrences. La lecture des séries échappe à une linéarité attendue par l’organisation formelle du plan de leur présentation. Ainsi, ce qui caractérise ce projet photographique, ce n’est pas tant l’exigence d’un point de vue qui se transposerait de lieu en lieu, mais plutôt le choix esthétique d’une vision multimodale. La proposition ici était de rendre perceptible la stratification du paysage en ramenant à la surface de l’image sa réalité horizontale. En effet, une strate paysagère ne s’inscrit pas dans une profondeur physique ou géologique, mais se présente plutôt comme une rémanence visible de l’action humaine qui a délaissé ou déplacé l’usage territorialisé d’un espace. Le projet présentait une forme de méditation sur la mémoire, l’oubli et le devenir, par des assemblages muraux modifiables. La plupart de ces vestiges se trouvent à l’écart des grandes implantations industrielles actuelles (celles-ci ont recouvert les précédentes) qui marquent ces paysages. Dans la continuité de mes travaux précédents, ce regard déplacé sur l’industrie interroge aussi son actualité et son devenir. Un manuscrit d’une quarantaine de pages fut rédigé sur cette histoire. Consigner les éléments du processus de réalisation intègre la perspective d’un projet global : inscrire mon travail dans une esthétique réflexive et compréhensive de la représentation des lieux et du territoire. Ces traces vont nécessairement disparaître. Une des spécificités de ma photographie est de constituer un document proposant la compréhension des modalités de sa construction. » Fabrice Ney
- Année•s : 1988-1994
- Commune•s : Callelongue, Étang de Berre, Fos-sur-Mer, Montredon, Plan d'Arenc, Rassuen, Saint-Blaise, Septèmes-les-Vallons
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Fabrice Ney
Documentation :
Fabrice Ney_Soude_Annexes_Inventaire (pdf)Fabrice Ney
Fabrice Ney est né en 1953, à Bizerte. Ses premiers travaux photographiques datent de la fin des années 1970, associés à ses études universitaires à l’EHESS: « Fos-sur-Mer » (1979), « La Seyne-sur-Mer » (1980-83), « Zup n°1 » (1981-83). Sa recherche se développe ensuite autour de la question de la représentation des lieux et du territoire: « Cap Sicié » (1984), « Km 296 » (1986). En 1989, il crée à Marseille l’association SITe (Sud, Image, Territoire), un collectif de photographes porteurs de propositions autour du thème de l’environnement et des enjeux de ses représentations photographiques (« Soude » (1993), « Quarantaine » (1993), « Résurgence », (1994), « Origine(s) », (1998)). En 1998, Il arrête son travail photographique qu’il reprend en 2013 (« Tentatives d’effleurements » (2014), « Abords et limites » (2015), « De Rerum Natura », (2018)) et revisite ses archives, après en avoir effectué des enregistrements numériques. Il regroupe l’ensemble de son œuvre sous le titre « Un regard sans personne ». Son travail photographique se caractérise par le choix de ses thèmes et la manière de les traiter: une unité territoriale à un moment choisi de son histoire saisie dans les détails révélateurs de ses enjeux. Privilégiant l’accumulation sérielle qui puise sa cohérence dans un cadrage rapproché des éléments constitutifs de l’environnement immédiat, l’accrochage au mur se présente sous des formes permettant des interprétations ouvertes, et pouvant s’articuler avec d’autres matériaux (scientifiques, sonores, poétiques…).
John Davies
Fos-sur-Mer and the Industrial Zone
À propos de la série
Cette série n'a pas encore de descriptif.
- Année•s : 1994
- Commune•s : Fos-sur-Mer
- Commanditaire•s : Ville de Fos-sur-mer
- © John Davies / Adagp, Paris 2020. Courtesy : Galerie des filles du Calvaire
John Davies
John Davies was born in 1949 in County Durham, England. His formative years were spent living in both coal mining and farming communities. His images of Ireland, Scotland and England, made between 1976-1981, were first published in the monograph Mist Mountain Water Wind 1985. In 1981 he started in Sheffield to document the urbanised landscape of Britain – first published in his book A Green & Pleasant Land 1987. An update of his British work from 1979 – 2006 was published in the book The British Landscape 2006.
During the mid 1980’s and throughout the 1990’s he was invited to work on numerous landscape and urbanisation commissions in France, Italy, Spain, Holland, Belgium, Portugal, Germany, Austria and Switzerland. His first commissioned work in France started in 1987 for a group book project ‘Les Quatre Saisons du Territoire’ for CAC, Befort. In 1994 he was commissioned to work in Fos-sur-Mer and the Industrial Zone – this was published as a group book by Fos Action Centre & Images En Manoeuvres, Fos natures d’un lieu 1999.
John Davies has four monographs that were commissioned and published in France: Temps et Paysage 2000, Le retour de la nature 2001, Seine Valley 2002 and Shadow – Terrils d’Europe du Nord 2016 (featuring the Artois’ mining basin in Northern France).
A fundamental aspect of his approach in visualising landscape is the sense of power it can symbolise and evoke and as metaphor; reflecting emotional and spiritual states. At the same time Davies is aware of the landscape representing power in terms of land ownership and material wealth.
Pierre Girardin
Venelles
À propos de la série
En arrivant à Venelles, j’ai été accueilli par un temps splendide. Je me suis installé à la terrasse du Café des Alpes pour siroter un Coca-Cola, tout en examinant la carte satellite de la ville sur mon téléphone afin de me repérer. L’autoroute que je venais d’emprunter traversait la commune telle une boucle d’un fleuve, avec une largeur de plusieurs dizaines de mètres. D’un côté, j’observais les rectangles colorés des parcelles cultivées, et de l’autre, le tracé sinueux des impasses bordées de maisons aux toits rouges et aux piscines turquoise. Venelles est passée d’une population de 600 habitants en 1960 à plus de 8 000 dans les années 2000, abandonnant ainsi son statut de village pour devenir une ville fonctionnelle. Mon travail est une exploration de l’identité périurbaine. C’est une promenade à travers la carte de cette commune : les quartiers résidentiels, la zone commerciale, les terres agricoles pressées par l’urbanisation, ainsi que l’autoroute qui la traverse en son centre. Son passé semble parfois avoir été délaissé et englouti par la modernité. Venelles ne possède d’ailleurs pas d’histoire marquante ni de monument important. J’ai choisi de me concentrer sur les interactions entre les zones urbanisées et la campagne environnante. Mes images interrogent l’expression de la modernité dans l’occupation de ce territoire qui, il n’y a pas si longtemps, était simplement un petit bourg du pays d’Aix.
- Année•s : 2020
- Commune•s : Venelles
- Commanditaire•s : Centre photographique de Marseille, Conseil Général des Bouches-du-Rhône, Patrimoine Commun
- © Pierre Girardin
Pierre Girardin
Pierre Girardin, né en 1989 à Rennes. Il vit et travaille à Marseille. Après un Bachelor en communication visuelle à l’ECAL (Suisse), c’est à Marseille, lors de son DNSEP aux Beaux Arts (2018—2020) qu’il réoriente sa pratique vers la photographie en expérimentant la matérialité et la couleur par le travail en laboratoire. Il en résulte des images picturales, mélangeant formes abstraites et figuratives. En parallèle, il explore la photographie documentaire en utilisant ses codes et son histoire.
Lucien Ayer
Là où le feu
À propos de la série
Il y a environ 10000 ans, le dessèchement de l’ancien delta de la Durance a donné naissance à la région des Coussouls, située entre Arles et Fos-sur-Mer. Ce territoire se caractérise par le charriage de galets et la formation d’une sédimentation minérale qui empêche la croissance des plantes. Il est considéré comme une steppe en raison de sa faune et de sa flore spécifiques.
Visuellement pauvre, ce territoire est composé par des éléments qui échappent à la vue, tels que le passage de pipelines en son sol ou encore des zones militaires interdites d’accès. Ce sont les bergeries qui forment le relief de ce territoire plat et aride dans ce lieu aux enjeux majeurs tant à l’échelle nationale qu’à l’internationale. La série photographique explore ainsi ce territoire en utilisant l’analogie du feu.
- Année•s : 2022
- Commune•s : Plaine de la Crau
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Lucien Ayer
Lucien Ayer
Diplômé de l’École Nationale Supérieure de la photographie d’Arles, Lucien Ayer se consacre à la photographie documentaire contemporaine. Son travail explore la manière dont les espaces sont habités à travers le médium photographique. Il met en relation l’architecture vernaculaire et son environnement. Il accorde une grande importance à l’évolution des milieux dans lesquels il réalise ses séries, qu’ils soient urbains ou ruraux, et cherche à documenter les enjeux qui les caractérisent.
Sylvain Duffard
Marseille, face B
À propos de la série
J’ai réalisé la série « Marseille, face b » à Marseille en avril 2006 dans le cadre d’un Workshop au sein de l’Atelier de Visu / Soraya Amrane. Dans le cadre de ce travail, je porte un regard sur le secteur urbain de la Corniche, espace résidentiel situé en front de mer, « calme et très côté » comme aiment à le vanter les agences immobilières phocéennes. Si Marseille est bien souvent dépeinte comme une « ville mosaïque, métropole multiculturelle, bouillonnante… », c’est à rebours que j’ai souhaité m’attacher à ce secteur urbain privilégié, à sa structure et à ses modes d’habiter.
- Année•s : 2006
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Sylvain Duffard
Sylvain Duffard
Né en 1975, Sylvain Duffard est photographe indépendant. Il vit et travaille à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Diplômé de l’Institut de Géographie Alpine (IGA), Université Joseph Fournier de Grenoble en 1999, c’est en autodidacte que Sylvain Duffard développe sa pratique photographique. Se confrontant à la commande dès 2006, il développe un travail portant sur le paysage quotidien, démarche rapidement sous-tendue par l’émergence de questionnements relatifs à ses modes de fabrication. Il fait ensuite l’expérience de la commande publique dans le cadre de missions photographiques consacrées à l’observation du paysage ; commandes inscrites dans le sillage de missions photographiques historiques telle que celle que la DATAR engagea au début des années 1980. Ces expériences constituent pour lui un espace d’apprentissage privilégié et le lieu d’une expérimentation riche et personnelle du paysage. De 2008 à 2010, il répond à une commande de l’Office National des Forêts ; commande qui donnera naissance à sa série « La forêt habitée ». Il réalisera ensuite successivement les séries chronophotographiques de trois Observatoires photographiques des paysages, à l’échelle du Parc Naturel Régional des Alpilles, puis du département de Haute-Savoie et enfin de l’Archipel Guadeloupe. De 2017 à 2018, l’Atelier des Places du Grand Paris lui confie une commande de paysage relative aux sites jouxtant certaines des futures gares du Grand Paris Express.
Arnaud Teicher
Wildfire
À propos de la série
Le 28 août 1989 la montagne Sainte-Victoire, chère à Paul Cézanne, s’embrasait. Le feu qui dura 3 jours et 3 nuits dévasta plus de 5 000 hectares et est devenu un des plus gros désastres écologiques dans le sud de la France depuis le siècle dernier. Dès le lendemain, suite aux premières diffusions d’images montrant un massif calciné et méconnaissable, une véritable prise de conscience des pouvoirs publics et des collectivités va être à l’origine de la mise en place d’une profonde organisation pour prévenir, entretenir, équiper et aménager les massifs forestiers du département.
Avec 148820 hectares de forêt, 29 % du département des Bouches-du-Rhône est couvert par des espaces forestiers. À la forêt sʼajoute une forte présence de landes ligneuses occupant 15 % du département. Plus de 40 % de ce territoire est donc fortement exposé aux risques dʼincendie. Par ailleurs, lʼannée 2016, avec 355 départs de feu et 4 974 hectares brûlés, dresse le bilan le plus élevé de cette dernière décennie. Le feu est un élément naturel et fondamental dans le fonctionnement de nombreux écosystèmes forestiers ; pourtant, cet événement reste imprévisible et difficilement contrôlable. Il faut souvent plusieurs jours pour parvenir à maîtriser sa progression. Des recherches de l’Inra montrent que chaque espèce a développé sa propre stratégie pour résister aux flammes et renaître de ses cendres.
Alors que je découvrais avec stupeur et curiosité ces territoires incendiés, l’idée d’un projet photographique s’imposa. L’émerveillement initial me questionnait. Je suis retourné souvent sur ces lieux pour observer et essayer de comprendre pourquoi je restais sous le charme malgré la désolation qui régnait partout. Après chaque incendie, la nature nous offre des paysages violents qui nous bousculent. Cependant, comme un signe d’espoir, la végétation reprend progressivement son chemin malgré la puissance du souffle et la chaleur étouffante. La forêt résiste, lutte et finit par évoluer et survivre. Cette fascination pour les territoires incendiés trouverait-elle sa source dans le fait qu’ils représentent un exemple de persévérance et de courage ? La capacité d’adaptation de la nature face à ces événements ne devrait-elle pas nous inciter à comprendre et à appréhender notre environnement avec davantage de bienveillance ?
- Année•s : 2017-2020
- Commune•s : Aix-en-Provence, Aubagne, Carry-le-Rouet, Eguilles, Marseille, Martigues, Montagne Sainte-Victoire, Rognac, Roquefavour, Saint-Cannat, Velaux, Ventabren, Vitrolles
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Arnaud Teicher
Documentation :
Arnaud_Teicher_wildfire_documentation (pdf)Arnaud Teicher
Né en 1985, Arnaud Teicher est un jeune photographe français installé dans le sud de la France. Après un cursus scientifique et des études de design à Paris, il s’est progressivement rapproché d’un environnement plus familier afin d’accorder du temps à une pratique photographique. Fasciné par les éléments liés à la terre et au paysage, Arnaud explore ce territoire à la recherche de traces, qu’elles soient dessinées par le temps, façonnées par le climat ou laissées par l’homme.
Pablo Rigault-Béligand
Paysage impossible
À propos de la série
Régulièrement en transit entre Marseille et Arles, j’ai longuement observé à travers la vitre du train qui offre une vision panoramique du paysage, les vastes plaines des Coussouls de Crau. Ces étendues planes, disparates, mystérieuses et arides, évoquent un paysage aux allures de Far-West français qui a nourri mon imaginaire, peut-être un fantasme, mais aussi une certaine inquiétude, une appréhension, lorsque je m’imaginais au milieu de ce vide apparent. Qu’y trouverais-je ? Quels seraient les signes, les sons ? Comment se déploient ces chemins noirs à peine perceptibles ? Comment s’y mouvoir ? Enfin, que se passe-t-il dans ces plaines rocailleuses ?
J’ai entamé mes explorations en partant de la gare de Saint-Martin de Crau, longeant la voie ferrée, parfois jusqu’à Miramas, afin de découvrir davantage ce paysage, de fouiller ces chemins sinueux que j’avais aperçus au loin, de m’assurer de leur existence réelle et de comprendre leur atmosphère. Mon parcours s’est révélé plus complexe que prévu : propriétés privées, riverains inquiets de ma présence, terrains militaires dont l’accès strictement interdit et dangereux ne m’ont été révélés qu’après-coup. Les sols que j’avais foulés à de nombreuses reprises se sont avérés potentiellement dangereux. Quelques minuscules panneaux disséminés ici et là, au beau milieu de rien, face à de rares troupeaux et autres traces d’une vie discrète, affichaient la mention « danger de mort ».
J’ai tenté de transcrire en images ces points de tension, de dresser le portrait de ce lieu qui se révèle à la fois une réserve naturelle magnifique et un territoire altéré, amputé, rendu hostile à l’homme par l’homme.
- Année•s : 2021-2022
- Commune•s : Saint-Martin-de-Crau
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Pablo Rigault-Béligand
Pablo Rigault-Béligand
Après avoir travaillé comme tireur au studio AZA à Marseille dans le cadre de son BTS en photographie, Pablo Rigault-Béligand a souhaité entreprendre des études plus approfondies sur l’image. Pour cela, il s’est orienté vers l’École Nationale Supérieure de Photographie d’Arles où il débutera un master en septembre 2023. Sa démarche photographique s’articule toujours autour d’un lieu, d’un topos, dont il étudie en premier lieu les ambiances, les émotions et l’histoire. Sensible à la poésie des paysages, qu’ils soient urbains ou ruraux, il ne se contente pas de flâner, mais préfère dériver et créer des situations. Il fouille, retourne, balaye et marche. Les traces qu’il conserve de ces expérimentations et recherches se traduisent en images, en textes tels que des nouvelles ou des poésies, en bandes sonores, en carnets informels, en cartographies surréalistes et en collages.
Emmanuel Pinard
Marseille
À propos de la série
En 2001, l’établissement public Euroméditerranée initiait, en partenariat avec le Ministère de la Culture et de la Communication et la Ville de Marseille, une commande photographique destinée à rendre compte des mutations du territoire dont il a la charge. Le secteur concerné, situé au nord du Vieux port, représente une superficie de 300 hectares dont le réaménagement est prétexte à repenser toute la relation que Marseille entretient avec son port. Emmanuel Pinard photographie généralement la substance urbaine des périphéries métropolitaines : le grand espace ouvert, qualifié par les seuls usages dont il est le support, et dénué de toute ambition symbolique. On a coutume d’opposer ce type d’environnement – considéré comme étant dénué de valeur, et chaotique – à l’espace urbain traditionnel du centre – regardé, au contraire, comme porteur de valeurs d’ordre, de hiérarchie et, symboliquement, de représentation de la communauté. Chacune des images produites par Emmanuel Pinard dans le cadre de la commande Euroméditerranée est comme une goutte d’acide déposée sur le vieux consensus de la supériorité du centre sur la périphérie : elle le dissout et donne à voir, en-dessous, l’image d’une ville dans laquelle les éléments d’échelle métropolitaine, tels que les viaducs autoroutiers ou les installations portuaires, cohabitent avec évidence et légèreté avec les éléments d’échelle locale et quotidienne. Dans cet environnement hétérogène, les buvettes s’abritent à l’ombre des piles d’autoroutes, une végétation à demi sauvage s’immisce entre les constructions, les bateaux blancs, plus grands que les bâtiments des quais, font la navette entre les deux rives de la Méditerranée, au-delà de la Digue du Large. La Digue du Large, à partir de laquelle Emmanuel Pinard a photographié la façade de Marseille sous la forme d’un fascinant polyptique de sept pièces et de plus de 8 mètres de long, installation monumentale, à l’image de ce front de mer portuaire et urbain, et qui oblige le spectateur désireux de voir l’ensemble à reproduire le mouvement du photographe marchant sur la digue. Digue du Large d’où, se retournant vers la mer, Emmanuel Pinard a photographié l’horizon, comme il l’a si souvent fait dans ses paysages périphériques. Cet horizon marin n’est pas une simple ligne séparant le ciel de la mer : il est comme incurvé – et, par là même construit – par la présence, à chacune de ses extrémité, de lambeaux de terres émergées. Au premier plan, des blocs de béton signifient l’artificialité de ce paysage habité et, en conséquence, sa dimension culturelle. Un horizon construit, un premier plan de matière, et un propos sur le territoire photographié : là comme à Chelles, à Créteil, à Montesson ou à Brasilia, un même regard, une même capacité d’analyse et un même mystère, pour dire que la photographie documentaire est un engagement artistique qui se situe bien au-delà de l’objectivité.
- Année•s : 2002-2003
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Établissement Public d’Aménagement Euroméditerranée, Ministère de la Culture et de la Communication, Ville de Marseille
- © Emmanuel Pinard / Adagp, Paris, 2020
Documentation :
Emmanuel Pinard_Marseille_Annexes_Inventaire (pdf)Emmanuel Pinard
Emmanuel Pinard est né le 17 octobre 1962 à Ham (60), et décédé le 6 septembre 2014 à Aulnay-sous-Bois (93).
Autodidacte, il s’oriente vers la photographie à l’âge de 18 ans. Son travail vise avant tout à donner à lire la structure profonde des paysages qu’il photographie.
« J’ai tenté de représenter ces espaces ordinaires en me concentrant sur l’épaisseur naturelle des choses, afin d’éviter toute échappée dans une représentation poétique du merveilleux de la vie quotidienne, sans association inconsciente même si ce qui motive le choix de cette photographie plutôt qu’une autre reste mystérieux. L’image n’est pas composée, elle s’impose comme un tout, comme une évidence. Elle s’impose par la force de sa généralité, au risque d’un certain formalisme. » Emmanuel Pinard
Son œuvre est jalonnée de nombreuses expositions personnelles et collectives, de bourses et d’éditions. L’enseignement occupe une place importante dans son parcours. Sa première expérience d’enseignement a lieu lors de son séjour à Brasilia dans le cadre de la Villa Médicis hors-les-murs. Il intervient ensuite à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Marne-La-Vallée, de Normandie et de Marseille. A partir de 2010, il est Maître assistant titulaire en Arts Plastiques et Visuels à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris-Malaquais.
Chris Garvi
Mother of Muses
À propos de la série
C’est à la fois l’amour de la ville et la photographie de rue qui ont motivé ce travail. La lumière, les couleurs et l’intensité d’une ville en effervescence m’attirent. La lumière, les couleurs et la diversité d’une ville en plein bouleversement, où certains quartiers autrefois populaires soumis à la gentrification ont laissé place à une nouvelle population plus aisée. Une forme de violence émane ainsi de ces images fortement contrastées, où l’entre-deux est à peine envisageable dans cette ville. Il fut un temps où l’on disait : « Marseille, tu l’aimes ou tu la détestes ». Force est de constater que la ville fait de plus en plus l’unanimité, si l’on s’appuie notamment sur la montée du tourisme et les prix de l’immobilier en pleine hausse… Cette série est toujours en cours de réalisation. Le titre est emprunté à une chanson de Bob Dylan, « Mother of Muses ».
- Année•s : 2013-2023
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Chris Garvi
Chris Garvi
Parallèlement à ses débuts en photographie, Chris Garvi a suivi des études de littérature et de civilisation anglaise et américaine en France, puis à l’étranger. Travaillant aussi bien en noir et blanc qu’en couleur, il continue de privilégier la photographie argentique pour tous ses projets personnels. Chris Garvi est un photographe autodidacte qui a fait son apprentissage à travers des livres de photographie.
Ses premières influences sont les photographes américains de la FSA (Farm Security Administration) et l’école humaniste française. Il varie et adapte ses « outils » en fonction de ses projets et de ce qu’il cherche à raconter. Il refuse de figer sa photographie dans une seule « technique » afin de lui permettre d’évoluer en permanence. Ses travaux, qu’ils soient documentaires ou fictionnels, témoignent de son attention particulière à leur aspect narratif.
Depuis 2000, ses travaux ont fait l’objet de plusieurs expositions et ont été publiés dans plusieurs magazines. Son travail « Marseille, colors I sing » a été présenté dans le catalogue des Biennales de la photographie d’Aubagne en 2016. En 2016, il a co-édité avec sa compagne Pauline Alioua leur premier ouvrage commun intitulé « Plein Cœur ». En 2018, leur travail commun sur le Maroc, intitulé « Dans le Creux du Manque », a été publié par l’éditeur arlésien Arnaud Bizalion.
« Je fais de la photographie depuis toujours, enfin, presque. Ma mémoire fonctionne toujours par fragments ; je n’ai jamais su me souvenir des choses dans leur continuité. Même lorsque je n’ai pas l’œil dans le viseur, je continue de photographier. Je suis toujours à la recherche de ma photographie, de mon regard : qu’y a-t-il dans cet espace qui me sépare de l’objet photographié : frontière, miroir, projection, chemin, passage, barrière, théâtre, réalité… »
Chris Garvi vit et travaille à Marseille.
Pascal Grimaud
Le temps présent
À propos de la série
Travail personnel ou de commande, sujet, description du processus d’enquête photographique, évolution du travail au cours de sa réalisation.
- Année•s : 2013-2016
- Commune•s : Boulbon, Charleval, Eygalières, Puyloubier
- Commanditaire•s : Conseil Général des Bouches-du-Rhône
- © Pascal Grimaud
Pascal Grimaud
Photographe, Pascal Grimaud vit et travaille dans le sud de la France. Il se consacre à des projets d’auteur au long cours.
Son travail donne lieu à diverses publications et expositions en France et à l’étranger. En 2004, il publie « Le bateau ivre, histoires en terre malgache » chez Images en Manœuvres, suivi en 2006 de « Filles de lune – de l’archipel des Comores à Marseille », et de « Maiden Africa » en 2009.
Dans le cadre d’une commande du Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône, il réalise de 2013 à 2016 un projet sur son village natal dans les Alpilles. Deux ouvrages rendront compte de ce travail : « Cahier 2013/2015 » et « Le temps présent » aux éditions Filigranes. Il retourne régulièrement à Madagascar, île qui ne cesse de questionner sa pratique photographique; et 10 ans après la sortie de « Filles de lune », il initie un nouveau projet dans l’archipel des Comores et sur l’île de Mayotte.
Geoffroy Mathieu
Marseille, ville sauvage
À propos de la série
« Ici, on ne sait jamais trop où s’arrête la ville et où commence la nature. A la fois industrielle et rurale, en friche et bétonnée, Marseille est un laboratoire à ciel ouvert où se réinvente la relation entre ville et nature, entre sauvage et civilisé, entre nord et sud. Le génie de la ville bouscule et interroge l’écologie urbaine – ce champ de recherche émergent qui, entre écologie et sociologie, propose de nouveaux modèles pour les villes de demain. Lorsque s’écroulent les modèles dominants, c’est souvent à la marge qu’on voit se dessiner l’avenir. » Baptiste Lanaspeze
- Année•s : 2007-2010
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Actes Sud
- © Geoffroy Mathieu
Documentation :
Geoffroy Mathieu_Ville sauvage_Annexes_Inventaire (pdf)Geoffroy Mathieu
Geoffroy Mathieu, né en 1972, diplômé de l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles, vit et travaille à Marseille. Ses travaux travaux interrogent la manière dont certaines questions écologiques ou politiques se concrétisent dans le paysage. À travers des protocoles de parcours, il documente les territoires en mutation, les frottements ville-nature ou les « résistances poétiques » dans les usages des lieux.
Teddy Seguin
L’île Castellane
À propos de la série
Envisager la cité de La Castellane à Marseille telle une insula romaine, une « île urbaine », voici le postulat de la résidence photographique réalisée dans ce quartier par Teddy Seguin entre 2014 à 2018. L’implantation de la Castellane dans les quartiers nord de Marseille et son architecture à l’image d’une citadelle imprenable participent de cette insularité urbaine. Une cité autour de laquelle on tourne sans pouvoir vraiment y pénétrer. A l’origine, son projet utopique consistait à recréer des cœurs villageois à la périphérie des quartiers du centre ville, mettant à disposition des habitants commerces, services et écoles. Si l’isolement social des habitants de la cité est l’expression de cette métaphore géographique, peut-on comparer le tempérament paradoxal de la Castellane à celui d’une île entourée d’eau ? Avec ses cinq points d’entrée et de sortie, la cité de la Castellane est un village dans lequel tout le monde se connaît. L’attachement des habitants à leur cité peut être considéré comme une des réussites principales du projet urbain des années 70’. L’ostracisme dont souffrent ces derniers, la solidarité, la méfiance face à celui qui est étranger à la Castellane, le refus de l’autorité et des lois régaliennes sont autant de paradoxes qui participent à un sentiment fort d’appartenance à la cité. Pour aborder cette insula, telle une île au milieu de la tempête, prudence et lenteur furent nécessaires.
L’exposition est accompagné par des textes de Youssouf Djibaba, écrivain qui a grandi dans le quartier de la Castellene. La série proposée fait partie du cycle INSULAE mené depuis une dizaine d’années par Teddy Seguin. A la manière des Insulaires de la Renaissance composés de cartes représentant exclusivement des îles du monde inconnu, le projet INSULAE propose un atlas photographique sur le thème de l’insularité. A l’origine, INSULAE met au défi l’objectivité supposée de la géographie par la proposition aléatoire et fantaisiste d’un archipel personnel d’îles éparses réelles et imaginaires, chacune d’elles devenant prétexte à un voyage. Le repérage de ces territoires insulaires, ne relève pas davantage d’une méthode rigoureuse qui présupposerait d’identifier sa situation, son éloignement d’un continent, sa forme ou son appartenance à un état. Les photographies qui composent INSULAE ne prétendent pas décrire une île en particulier mais davantage effleurer, à force de répétition, une idée d’île, son dedans et son dehors, la difficulté d’accoster, l’immersion dans un monde clos jusqu’à la tentative d’y assumer son altérité. D’une série à l’autre, un objet abandonné, l’expression d’un visage, l’embrasure d’une fenêtre, une perspective sont autant de signes qui fabriquent par leur récurrence, une matérialité du paysage insulaire. L’expérience intime de ces voyages, la rencontre et la découverte d’un territoire a priori hostile forment le terreau de la série INSULAE. Dans cette recherche, l’insularité retient la métaphore cartographique comme fil rouge du projet. Oasis, ghettos urbains ou villages isolés ne reproduisent-ils pas partiellement un modèle insulaire ? Ces environnements ont-ils comme socle commun une tentative d’échapper à l’emprise de la société, de créer un rapport différent à l’espace et à l’autre ? De façon assez surprenante, l’étymologie de l’île, du latin insula qui définit une terre entourée d’eau est semblable à l’insula qui apparait au 1er siècle dans l’urbanisme de Rome et qui désigne un immeuble d’habitation collectif en opposition à la domus, la demeure du maître. Entité dynamique et paradoxale, espace à la fois immuable et fluctuant, image de l’Eden, terre de l’utopie ou de l’isolement, de la solitude et de la mort, l’île est une image mentale créée par le langage. Cette expérience visuelle nous transporte dans des territoires insulaires aussi contrastés que les outport à Terre-Neuve, la cité de la Castellane à Marseille ou la région montagneuse de Castagniccia en Corse.
- Année•s : 2014-2018
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Teddy Seguin
Documentation :
Teddy Seguin_L’île Castellane_Annexes_Inventaire (pdf)Teddy Seguin
Teddy Seguin est sorti de L’Ecole nationale supérieure de la photographie d’Arles en 2002. Il se consacre dans un premier temps à la photographie de reportage dans laquelle il explore les univers clos. Ses reportages sont régulièrement publiés dans la presse nationale et internationale. Les microcosmes d’une mine dans les steppes Kazakh, d’un navire de pêche en mer de Barents ou d’un campement de chasseurs cueilleurs dans une forêt équatoriale constituent la base de son travail actuel. A partir de 2010, il commence à développer un travail d’auteur autour de l’insularité. La mondialisation a beau réduire les frontières qui séparent encore les « insulaires » du reste du monde, l’isolement, qu’il soit géographique, social ou culturel façonne encore des caractères forts et singuliers sur lesquels Teddy Seguin s’attarde dans ses dernières séries comme « Outport », « la Natividad » ou « L’île Castellane ». Ces différents travaux sont regroupés dans un cycle encore en cours intitulé INSULAE. Le deuxième chapitre de cette série, « L’île Castellane », vient d’être publié au Editions Zoème.
Anne Loubet
Les jardins ouvriers
À propos de la série
« En 1998, fraichement installée à Marseille, je suis allée à la rencontre de la ville imprégnée de la nostalgie de ma région natale (le Nord). Je me suis intéressée à l’existence d’ilot collectif, de lieux qui ne soient pas propriété individuelle ou familiale, des endroits pensés pour le collectif. L’utopie d’un partage de la terre entre citoyens voisins, locataires de la ville me berce. Je me suis rendue compte de l’importance des jardins partagés sur la ville et de leur répartition est – ouest. Marseille est une ville de collines et la géographie des parcelles est riche en découverte et imaginaires. Il y a celles qui épousent les limites imposées par le canal de Marseille, la voie ferrés, les routes, et qui se développent en restanques. D’autres se dessinent, tracées au cordeau, basées sur un souci d’équité parcellaire. Certains jardins sont adhérents de la Fédération des Jardins Familiaux et Collectifs, avec des terrains hérités de donateurs privés ; d’autres sont propriétés de la ville (beaucoup moins). J’ai limité mon territoire d’enquête aux jardins de la Fédération. J’ai suivi différents biais d’enquêtes :
– Contact avec la Fédération des Jardins Familiaux à Paris qui m’a donné le nom des présidents et responsables locaux. Pierre Esposito, le président local de l’époque, m’a ouvert l’accès aux jardins (notamment Le Castellas où il avait lui-même une parcelle) et guidé pour mes rencontres auprès des jardiniers. Pour l’anecdote, en juillet 1998, Jean-Claude Gaudin lui remet en personne, les insignes de l’ordre national du mérite lors d’une cérémonie officielle se déroulant au jardins de Mazargues
– Recherches aux archives municipales et départementales, au musée d’histoire de Marseille pour connaitre l’état des lieux d’une documentation historique sur la ville. Les intentions du projet photographique : Quel paysage les jardins parcellaires dessinent ils dans la ville ? Je voulais inscrire leur localisation et empreinte vitale au sein du maillage urbain. Représenter la bulle d’air qu’ils procurent aux jardiniers en mettant en valeur la présence végétale et arborée de ces îlots dans une mégapole. Jouer sur les limites entre le cultivé – le sauvage ; le bâti éphémère, les espaces communs et individuels des parcelles. J’ai souhaité bien évidement aller à la rencontre des jardiniers, locataires provisoires de ces espaces (aux vues du rythme propre aux cultures, un contrat d’un minimum de 3 ans est alloti aux jardiniers. Profils variés, famille, retraité, ancien ouvrier conservant le « bleu » pour aller au jardin, je relève les désirs multiples qui les animent. Du bain de soleil, la vie au grand air, au plaisir de soigner et distinguer son enclos. Les portraits individuels sont réalisés au 6×6 , frontaux et posés . Au jardin de la Valentine, les parcelles sont toutes alignées et de taille identique , le portillon est un signe puissant de distinction. Je choisis de développer un protocole de prise de vue identique pour photographier chacun d’eux. Attirée par cet élément de l’habitat, symbolique du passage dedans-dehors, privé-public. Il y a donc des images qui se complètent : des paysages ouverts sur l’horizon de la ville qui situent le jardin dans le maillage urbain de Marseille. Des portraits des jardiniers dans leur parcelle et des espaces intérieurs. Une série sur les portillons au jardin de La valentine. Assez peu d’images des temps communautaires (hormis un apéritif récompensant les travaux collectifs dans les allées, la cérémonie de récompense de M. Esposito). » Anne Loubet
- Année•s : 1998-1999
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Anne Loubet / SAIF
Anne Loubet
Le Nord a été le terreau de l’imaginaire d’enfance d’Anne Loubet. Elle aborde la vie avec légèreté, observe ses contemporains sans drame ni tragédie, et accorde une certaine sacralité aux gestes et aux personnes ordinaires, portée par un idéal communautaire.
Après des études de lettres et de cinéma documentaire à l’Université de Lille, Anne Loubet s’est tournée vers la photographie à l’école d’Arles. Elle puise son inspiration aussi bien dans l’audace performative de Sophie Calle que dans la frontalité de Diane Arbus, la vitalité des peintures de Goya ou de Bruegel, ainsi que les portraits grinçants de Velasquez.
Xavier Lours
Rodéo
À propos de la série
«Plan-de-Campagne est un monde en soi. Avec ses 520 enseignes disposées sur plus de 250 hectares, elle est communément présentée comme la plus grande zone d’activités commerciales de France et la seconde d’Europe. Créée en 1960 en périphérie de Marseille, sur un modèle importé des malls américains, son paysage compose avec un mélange d’architecture industrielle, de nappes de béton et d’immenses publicités lumineuses.
J’ai toujours trouvé cette zone extrêmement photogénique de nuit. De nombreux projets photographiques ont documenté son évolution, à l’instar de celui d’André Mérian (série « The Statement », 2002) ou des missions photographiques de la DATAR. J’ai pour ma part commencé à m’intéresser à ces décors en y expérimentant une méthode déambulatoire inspirée des dérives situationnistes.
La nuit, à la fermeture des magasins, l’ambiance change. Beaucoup de jeunes viennent profiter des quelques bars, des fast-food, du cinéma ou du bowling. Plan-de-Campagne devient un plateau libre sur lequel, à l’écart de la ville et des habitations, des usages s’inventent. Les meetings de la série « Rodéo » en sont un exemple. Suite à quelques recherches sur les réseaux sociaux, j’ai pu me rendre à certains d’entre eux durant l’été 2018. Ils ont toujours lieu le même jour et durent parfois jusque très tard. L’organisation spatiale de ces rassemblements m’a d’abord étonné. Les participants se regroupent par modèles de voitures : les allemandes sur le parking de Kiabi, les italiennes sur le parking de But, etc. La plupart du temps, il ne s’agit que de rassemblements statiques entre amateurs de voitures trafiquées. Mais parfois, l’atmosphère s’électrise. Alors, les parkings se transforment en arène pour rodéos urbains. Il s’agit pour les participants d’enchaîner, à tour de rôle, des drifts devant des spectateurs ravis filmant au smartphone. » Xavier Lours
- Année•s : 2018
- Commune•s : Cabriès, Pennes-Mirabeau
- Commanditaire•s : Collectif Point-Virgule
- © Xavier Lours
Xavier Lours
Xavier Lours est urbaniste-photographe à Marseille. Amoureux de street-photography, il utilise le médium photographique avant tout comme un motif à la dérive. Son travail se situe principalement dans des décors très urbains, au cœur d’ambiances populaires, chaotiques et festives. Les villes sont des protagonistes à part entière de ses images. Il réalise, par ailleurs, des reportages pour la presse et aime collaborer, au gré des rencontres, avec des musiciens, des architectes, des artisans, etc.
Gaëlle Delort
Le mont incertain
À propos de la série
Cette série a été réalisée dans le cadre de l’atelier pédagogique Fos-sur-Terre, proposé à l’ENSP d’Arles, mené par Gilles Saussier et dont l’objet est un retour sur la commande historique de la DATAR.
Le Mont Incertain recompose un récit de l’ascension fictive du point culminant du delta du Rhône, le crassier du groupe sidérurgique ArcelorMittal à Fos-sur-Mer. Inspiré par le roman inachevé de René Daumal, Le Mont Analogue (1952), ce travail prend pour point de départ l’analogie entre ce site industriel et un site naturel de montagne.
Ce travail présente des relevés à la chambre photographique 4 x 5 de la matérialité et des couleurs du crassier, tout en évoquant son ascension. L’usage de la chambre grand format permet une qualité de détails, une topographie révélant la cohabitation d’indices naturels et anthropiques qui composent ce lieu, tout en jouant avec l’image du paysage de montagne. L’usage majoritaire de la couleur donne également à voir la richesse colorimétrique en partie due à la végétation de cette « montagne » de déchets sidérurgiques.
L’image qui ouvre cette série est un tirage par contact de deux images au format 6 x 9 cm réalisées avec un vieil appareil Kodak lors de mon premier repérage. Elle opère une première vision de l’expédition en préparation.
En 2022, ce travail photographique a été présenté en dialogue avec une installation titrée « Prélèvements ». A la manière d’un inventaire de fouille archéologique, des éléments récoltés sur le crassier en mars 2020 sont présentés sur une planche placée au sol, sous les photographies.
- Année•s : 2019-2020
- Commune•s : Fos-sur-Mer
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Gaëlle Delort
Documentation :
Delort_documentation (pdf)Gaëlle Delort
Artiste photographe née en 1988 à Aurillac dans le Cantal, Gaëlle Delort vit et travaille en Lozère. Après ses études à l’École des beaux-arts de Lyon, elle se forme à la photographie argentique auprès de Dominique Sudre. Elle collabore plusieurs années avec des structures publiques et associatives oeuvrant dans le champ de l’art et du spectacle vivant, avant de rejoindre en 2018 l’École Nationale Supérieure de la Photographie à Arles, où elle obtient en 2022 son diplôme avec les félicitations du jury. Elle présente cette même année son travail dans le cadre de l’exposition Une Attention Particulière aux Rencontres d’Arles. En 2023, elle est invitée par Adrien Bitibaly à Photosa, biennale photographique à Ouagadougou, Burkina Faso, et lauréate Jeune photographie Occitanie du Centre photographique documentaire ImageSingulières pour son projet Karst.
Mis en mouvement par les formes de l’architecture, de la géologie et de la littérature, son travail s’inscrit dans un temps long, celui de l’exploration. Par la collecte d’indices qui composent l’épaisseur d’un lieu et ses paysages, elle s’attache à capter des formes de résonances entre des temporalités humaines et géologiques, jouant de la profondeur du monde et de la surface des images.
Philippe Piron
Arenc
À propos de la série
Projet documentaire sur le quartier d’Arenc (Marseille) avant sa transformation par le projet d’aménagement urbain Euroméditerranée. Ensembles de photographies de paysages urbains et d’architectures. Projet réalisé avec le soutien de l’association le Mur du Son.
- Année•s : 2007-2008
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Philippe Piron
Documentation :
Philippe Piron_Arenc_Annexes_Inventaire (pdf)Philippe Piron
Philippe Piron a d’abord travaillé sur des projets d’analyse et de gestion des paysages ruraux au sein de différents organismes (CAUE, Conseil général…). Cette première approche technique du paysage sera complétée par une formation en photographie dirigée par Serge Gal à l’école Image Ouverte (Gard).
Après s’être établi à Marseille, il réalise des commandes pour des architectes et des institutions (CAUE13, DRAC PACA, Euroméditerranée…). Il développe également des projets personnels et participe notamment à de nombreuses marches collectives qu’il documente photographiquement en réalisant des carnets. En 2013, au côté d’artistes marcheurs, il participe à la création du GR2013, sentier de grande randonnée périurbain. Il s’installe à Nantes en 2012. Il est né en 1974 dans le Maine et Loire.
Karine Maussière
Littoralités, Marseille
À propos de la série
« Tramé dans la lumière, le littoral méditerranéen a une relation particulière avec le ciel. Se perdre sur son bord, c’est être disponible aux abondances visuelles et sonores qui s’offrent et découvrir de nouveaux contours de son territoire mouvant. Les photographies ont une dominante et répondent à une approche sensible par le pas de l’errance. Mon geste est un instant vécu sur le chemin. Il s’agit de voir ce qui fait sens au bord, d’écrire l’image qui est en train de se faire. » Karine Maussière
- Année•s : 2012
- Commune•s : Marseille, Martigues
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Karine Maussière / SAIF
Karine Maussière
« Je vis sous le soleil, exactement, au milieu d’un jardin, dans le sud de la France. Née en 1971 d’un père passionné de haute montagne, je me familiarise très tôt à la marche. De cette enfance baladée, il me reste des paysages arpentés, écoutés, contemplés, humés, aimés. Traces durables qui me font aujourd’hui encore m’émerveiller face à la beauté du monde. C’est dans cet élan que je positionne mon esprit dans un mouvement d’ouverture. Les paysages me procurent un sentiment d’être au monde en favorisant une appartenance commune à la terre. Diplômée des Beaux Arts, j’utilise la photographie dans ma relation au monde tout en interrogeant ma place dans la pensée écologique à l’ère de l’anthropocène. « Ensemble, nous décidons que la Terre est un seul et petit jardin. » Cette proposition de Gilles Clément, initiateur du jardin planétaire, bouleverse la réflexion sur l’homme et son environnement. La Terre est, comme le jardin, un espace clos, fini et arpentable que l’Homme doit ménager. A partir de ces idées, je choisis de mettre le paysage au coeur de mes préoccupations et décide de développer des axes de recherches sur les paysages. Paysages à la nature changeante mais aux qualités esthétiques indéniables, le paysage devient sujet d’étude et de représentation. La quête de son appropriation habite ma recherche artistique. Cette appropriation se fait par l’image et par le mouvement du corps. Depuis, la notion du mouvement est comme un leitmotiv. » Karine Maussière
Marie-Pierre Florenson
Parvis Ouest Côté Mer
À propos de la série
Mon lien avec le quartier de la Joliette remonte à mon arrivée à Marseille en 1989. J’ai vécu à proximité de la Major, et à l’époque, la partie de l’esplanade côté mer servait de parking et de terrain de football. À partir de 2011, j’ai développé un intérêt particulier pour ce quartier qui allait subir une transformation radicale avec le projet Euroméditerranée. J’ai redécouvert la beauté du paysage, l’espace en friche et sa diversité d’occupants qui continuaient de s’approprier les lieux, transformant ainsi cet espace en une scène de théâtre surprenante. Que ce soit à travers le mouvement, l’immobilité ou la contemplation, les gens investissaient ce territoire en le traversant ou en s’y arrêtant, créant une « géographie intime dans la géographie », comme l’écrit Paul Ardenne.
Au fur et à mesure des travaux de réaménagement, j’ai souhaité conserver une mémoire de cette période de transition, depuis son état initial d’espace abandonné jusqu’à sa réhabilitation complète. Mon objectif était de rendre compte du changement progressif d’un même lieu, l’esplanade de la Major. Quelles nouvelles transformations allaient apparaître ? La série de photographies que j’ai sélectionnées provient de prises de vue réalisées entre 2011 et 2018.
C’était une sorte de rituel pour moi, un trajet depuis le Vieux-Port jusqu’au MUCEM, puis vers l’esplanade de la Tourette et la Major.
- Année•s : 2011-2018
- Commune•s : Marseille
- Commanditaire•s : Travail personnel
- © Marie-Pierre Florenson / SAIF
Documentation :
Marie-Pierre_Florenson_documentation (pdf)Marie-Pierre Florenson
Mes recherches artistiques explorent plusieurs axes, notamment la mise en scène du corps et l’individu dans l’espace public, en particulier lors de performances, dans les bibliothèques et en milieu urbain. Mes photographies interrogent les relations entre le corps, ses mouvements et ses récits, ainsi que la façon dont on s’inscrit dans un territoire.
J’ai débuté ma carrière au SIRP (Salon de Royan) en 1994 avec une série de photographies mettant en scène une figurine en argile représentant mon double dans différents contextes. Pendant 20 ans, j’ai ensuite développé un travail sur la danse contemporaine, présenté sous forme de diptyques. À partir de 2004, je me suis intéressée aux corps des lecteurs dans les bibliothèques, ce qui a donné lieu à plusieurs installations à Brest (2008), Aix-en-Provence (2010), Aubagne (2011), ainsi qu’à la Bibliothèque Universitaire Saint Jérôme à Marseille (2020 et 2022). Parallèlement, depuis 2006, j’ai porté une attention particulière aux transformations des territoires urbains et à leurs multiples réappropriations, ce qui a donné lieu à différentes expositions, telles qu’à la Urban Gallery à Marseille (2006), au Vol de Nuits à Marseille (2009), au Musée d’Histoire de Marseille (2016) et au MUCEM (2017).